vendredi 26 février 2021

Denis Van Schandevyl et les formations ACFF: "N'hésitez pas à vous lancer!"

 Denis VAN SCHANDEVYL, 39 ans, est le coach de l'AS VAUDIGNIES (P3 Hainaut). Il vient de décrocher, avec distinction, son diplôme UEFA B. C'est à ce titre que nous l'avons interrogé. Il tire le bilan de cette première moitié de formation à l'ACFF, l'occasion pour nous de vous en présenter les principales orientations.



Site du club


Le secours du coaching

À l'âge de 30 ans, Denis revient d'une saison à Biévène et signe à Vaudignies pour se rapprocher de son domicile. Hélas, comme cela arrive à de nombreux footballeurs, une blessure aux ligaments croisés du genou le force à mettre plus tôt que prévu un terme à son activité de joueur...
Les dirigeants du club ont alors la bonne idée de lui proposer de prendre les U21 en charge. Le pied est mis à l'étrier, Denis ne l'en retirera plus, jusqu'à présent toujours fidèle au club chiévrois: 2 ans avec ces jeunes espoirs, puis l'équipe B pendant 3 saisons et demie, avant d'être appelé dès le mois de novembre 2017 à prendre le relais d'Éric MBAYA en équipe A. 

Retour en P3

Après 2 saisons en P4, c'est en mai 2020 que Denis atteint son premier grand objectif en tant que coach: ramener les Noir et blanc en P3. Une promotion obtenue au titre de meilleur deuxième de toutes les séries hennuyères.


Photo Vers l'avenir


Une soif d'apprendre

"Humble et très à l'écoute, Denis présente exactement le profil attendu dans ces formations."
(Jonathan KRYS)

Pendant sa carrière de joueur, Denis a surtout connu des coachs "à l'ancienne": en caricaturant un peu, physique le mardi, avec beaucoup de course sans ballon, de la finition et des "démarquages". C'est donc avec la volonté de se former qu'il décide de s'inscrire aux formations dispensées par l'ACFF:

"Pour m'acquitter correctement de la mission qui m'était confiée, je souhaitais acquérir des connaissances supplémentaires, de bonnes bases sur lesquelles travailler." 

Brevets C et B

C'est à Péruwelz, sous la guidance de Jonathan KRYS, que Denis effectue sa première année de formation. Axée dans un premier temps sur le jeu à 5 (qui donne droit au titre d'Animateur - UEFA C), puis sur le jeu à 8 (Initiateur - Brevet B). Le foot à 11 n'étant abordé que dans des discussions officieuses.

Il ne retire que des satisfactions de cette entrée en matière: "Nous avons en effet reçu de solides fondations pour la suite de notre parcours. Par sa méthode de travail, Jo nous a bien préparés à l'UEFA B; tous les gars issus du Centre de Péruwelz ont pu s'en rendre compte. C'est un très bon professeur, qui prend plaisir à nous transmettre ses connaissances."


Éducateur - UEFA B

Fort de cette première expérience concluante, et entouré de ses condisciples régionaux, Jimmy DUBART, Sven LELEUX et Jean-Philippe DI NANNO ("On nous appelle amicalement les Athois"), Denis se lance à la quête de son objectif initial, le diplôme UEFA B. 
Formation poursuivie au Centre de Mons, où ses professeurs se nomment Frédéric BALAN (coach dans le Brabant Wallon, à Villers-la-Ville, après Ophain et Nivelles) et Thanh TOAN TRAN (T2 au SK Renaix).
Formes d'échauffement, formes de match, formes intermédiaires, c'est à présent toute la structure d'entraînement pour le foot à 11 qui est au coeur de l'apprentissage. Un drill didactique mêlant les préparations "papier" et le travail sur le terrain. "Et c'est peut-être là notre seul regret, constate Denis, le fait que les restrictions sanitaires nous aient privés de quelques mises en situation pratique."
L'évaluation respecte le même équilibre théorie-pratique: "Pour ce qui est de notre examen sur le terrain, nous avons 2 à 3 semaines pour préparer des séances complètes sur des thèmes imposés, et le jour de l'examen, que nous avons passé en session groupée avec les U15 et les U17 du CS Pays Vert Ostiches-Ath, le prof tire au sort à la fois l'ordre de passage et la partie de l'entraînement que vous allez devoir démontrer."
Et en ce qui concerne l'examen écrit? "Suite à une situation de match projetée sur écran, nous devons déterminer quel est le problème observé et construire une séance complète de correction. Notre cahier de travail est également évalué, et nous devons encore compléter un questionnaire à choix multiple sur la vision de jeu de l'ACFF."

Bien conseillé

Savoir prendre conseil et tirer profit d'un guide expérimenté est le moyen le plus sûr de grandir dans la fonction. Pour le soutenir et faciliter son évolution, Denis a pu bénéficier d'un accompagnement pédagogique en la personne de son maître de sage, Philippe VENTUROSO:
"Une aide on ne peut plus précieuse. Philippe a pris le temps de m'accompagner lors des passages sur le terrain, de corriger mes séances et de discuter sur des thèmes précis. Il m'a fait prendre conscience de ce que certains détails peuvent faire la différence. Par exemple, à l'occasion d'un entraînement dont le thème était "être libre, être jouable", où le joueur devait réaliser un "appel/contre-appel", il m'a fait remarquer comment rajouter un simple plot de couleur facilitait l'apprentissage."





En collaboration avec l'ADEPS

Outre la formation spécifique, les candidats doivent assimiler de nombreuses matières plus théoriques (fiscalité, préparation physique, gestion des émotions, âges des apprentissages, handisport, multimédia, etc.) sous forme de syllabus à télécharger et de cours en ligne. 
"Plusieurs centaines de pages à étudier, tout cela représente une grosse charge de travail, et ce n'est pas évident, surtout pour ceux qui ont quitté l'école depuis plus longtemps...".

En route pour l'UEFA A?

Après cette formation de base, l'étape suivante dans le cursus proposé par l'ACFF est celle d'Entraîneur UEFA A (pour advanced ou avancée). Soit 2 nouvelles années de cours. Prêt à se lancer, Denis? "Je suis toujours en questionnement. Alors que je pensais sincèrement que ce serait d'un niveau trop élevé pour moi, mes profs m'ont encouragé à poursuivre. Mais je sais que si je le fais, c'est à fond! Et il faut pouvoir gérer un emploi du temps déjà chargé avec le boulot, la vie familiale et la gestion de mon équipe. Je me doute que cette seconde partie de formation demande encore davantage de préparations et d'investissement. Mais j'avoue que c'est tentant. J'ai notamment envie d'en apprendre plus sur la préparation physique. Mon ami Jonathan LABIE m'a régulièrement tuyauté dans ce domaine, et c'est sans doute le point sur lequel j'ai la plus grande marge de progression. C'est en tout cas une motivation supplémentaire pour tenter l'aventure. Surtout que les copains athois semblent aussi décidés à mettre le cap sur Tubize!" 

Oser se lancer

"Si je devais donner un conseil à tous ceux qui hésiteraient à se lancer, c'est de ne pas avoir peur d'y aller. Comme je l'ai dit, j'étais moi-même réticent au départ, craignant d'être un peu limite pour ce niveau. Mais ces formations sont justement conçues pour apprendre et acquérir de nouvelles connaissances. Au-delà du diplôme obtenu, c'est une formidable expérience acquise. Les échanges entre candidats sont aussi très enrichissants, et cela permet en outre d'avoir de nouvelles relations dans le milieu, ce qui est loin d'être négligeable."

www.acff.be
www.sport.cfwb.be
www.sport-adeps.be







dimanche 21 février 2021

Le leadership

Le capitaine est important, mais la présence d'un certain leadership dans l'équipe est vitale

Carlo Ancelotti

Après avoir évoqué le capitanat dans un précédent article, examinons à présent la notion de leadership, que l'on peut définir comme étant une aptitude naturelle à diriger. 

Nous avons sondé plusieurs coachs régionaux pour leur demander ce qu'ils avaient pu observer à ce propos dans leur groupe...

Leader naturel

On ne s'improvise pas leader charismatique; c'est en effet quelque chose que l'on a en soi, ou pas...

 Johan Devos, coach à la JS Isières (P2) le confirme: 

C'est un problème que j'ai déjà relevé à maintes reprises. J'ai des garçons motivés, avec beaucoup d'enthousiasme, mais pas de leader né! Ca ne s'invente pas, on ne le devient pas, on l'est tout simplement, dans l'attitude et dans la prise de parole, sur et en dehors du terrain. 

Il y a bien Maxime Grosse qui incarnait ça à mes yeux, mais sa blessure ne lui a plus permis de disputer le moindre match sur les deux dernières saisons. Il sera précieux comme entraîneur adjoint "à temps plein".


                    

                                                      Photos empruntées au site de l'AC Anvaing

Le parallélisme avec la situation vécue par François ÉCHEVIN au FC Esplechin (P2) est frappante; il rencontre en effet le même cas de figure: 

Honnêtement, c'était un problème cette saison. Je pensais que certains transferts avec de l'expérience allaient reprendre le rôle de Thomas MERCIER (NDLR: qui a raccroché les crampons). Mais ça n'a pas été le cas. Pour moi, un leader doit relayer les infos du staff, mais aussi insuffler une motivation ou ramener de la sérénité en fonction des moments du match. Il doit pouvoir donner de l'assurance aux joueurs en difficulté sur le moment. 
J'ai Miguel COQU qui le faisait aussi, mais il est maintenant passé dans le staff en tant que T2. Ca ne doit pas nécessairement être le capitaine, mais une personnalité forte, qui ressente les moments-clés d'une partie. 


Fr. Échevin (brassard rouge)  et M. Coqu (brassard de capitaine) en haut à droite

Photo Nord-Éclair

Ce leader naturel, Giovanni SEYNHAEVE (RFC Luingne, P2) a de son côté la chance de le compter dans ses rangs, en la personne d'Émile WINDAL, son talentueux médian axial, qu'il avait déjà côtoyé plus jeune à l'Excel: 

C'est un leader sur et en dehors du terrain. En match, il coache, replace et conseille sans cesse. Un leader naturel sur le terrain, de par le jeu qu'il propose, et sa position centrale. Il n'hésite pas non plus à prendre des initiatives pour le groupe en dehors du terrain, et il a la délicatesse de toujours m'en parler avant. 


                                                                                    Site du club


Semblable satisfaction à l'US Thumaide (P3) pour Philippe LABIE, qui ne tarit pas d'éloges à l'égard de Mathieu CROMBIN, un élément défensif gaucher capable d'évoluer en 4 ou en 5, mais également d'arpenter seul son flanc dans un système à 3 défenseurs : 

 Intelligent, poli, éduqué, très posé dans sa manière de parler. Un leader naturel, qui montre déjà l'exemple aux entraînements en se donnant à fond du début à la fin de la séance. Très humble, alors qu'il a joué à un niveau bien plus élevé! Un véritable régal pour un coach d'avoir un tel élément sur qui se reposer pour faire passer son message. C'est tout simplement la classe. Il ne doit pas forcer son talent d'homme et de joueur pour être respecté du groupe et de moi-même. C'est d'ailleurs le premier joueur que j'ai contacté pour qu'il reste au club la saison prochaine...




                                                                    Site du club


Différents types de leadership

Parmi toutes les personnalités forcément différentes qui composent un groupe, on peut trouver plusieurs sortes de leaders: psychologiques, techniques, d'entraînement, d'ambiance, etc.

Une diversité parfaitement illustrée par les dires de Gwen RUSTIN, coach de la RAS Pays Blanc (P1): 


Photo DH Geoffrey DEVAUX

Je pense effectivement qu'il y a plusieurs types de leaders. Le premier auquel on pense est bien sûr le leader mental. Sur la courte saison 2020-21, on a pu voir Pierre URBAIN s'élever naturellement dans ce rôle. C'est quelqu'un qui a la faculté de parler devant le groupe, au vestiaire ou sur le terrain, dans les moments difficiles ou importants. Il a un franc-parler naturel, une énorme mentalité de gagneur qu'il tente de communiquer au groupe. Ses tackles verbaux sont parfois aussi durs que sur le terrain, parfois difficiles à encaisser mais cependant bénéfiques pour nos jeunes joueurs au mental parfois un peu tendre. Je pense que Romain DELABY pourrait aussi devenir un leader dans l'équipe; ses qualités intrinsèques et son parcours à plus haut niveau peuvent lui conférer une aura de leader. Idem pour Valentin RAMSER, qui deviendra également un exemple à suivre. 

Ensuite il y a aussi les leaders techniques, des joueurs capables dans un bon jour de poser le ballon au sol, de rassurer les autres, et de leur permettre à leur tour d'élever leur niveau de jeu et d'oser un peu plus. Dans mon groupe, je pense d'abord à Adrien DETEMMERMAN . Il a une qualité technique au-dessus de la moyenne. On sait qu'on peut lui donner la balle n'importe quand, il la "nettoiera" et la rendra proprement à un équipier. Il est toujours à la recherche du beau football et de la solution élégante. Il y a ensuite Thomas BOUCART, qui est capable de garder un ballon, tant par sa technique que par sa puissance physique. Il est toujours capable de créer un exploit individuel; quand on est dans le dur, on sait qu'il peut faire basculer la rencontre. 


Caractéristiques du leadership

Récapitulons donc ce que l'on entend principalement par "avoir du leadership":

- la motivation: tirer ses équipiers vers le haut, les pousser à se dépasser et améliorer leurs performances, les aider à aller chercher ces 5% supplémentaires de performance.

- transmettre une énergie positive au groupe, encourager, surtout dans les moments difficiles. "Bien joué", "bien essayé" sont parmi les mots de coaching les plus influents. 

- imposer le respect par son engagement et son comportement.

Ces premières caractéristiques se retrouvent dans le ressenti de Florian SENÉCA, coach du FC Bléharies (P3): 


Site du club

Dans mon équipe, deux personnalités incarnent bien ce leadership. Nos capitaine, Pierre-Olivier DECALUWÉ, et vice-capitaine, Joseph BRUGGEMAN.


P.-O. Decaluwé, debout, 4e en partant de la droite - J. Bruggeman, 1er accroupi à gauche

Photo David Dusoulier (Nord-Éclair)

Tous les deux sont des joueurs expérimentés, charismatiques, qui ont souvent une vision juste de la situation présente. Ils ont une influence importante sur le groupe et savent à quel moment ils doivent booster l'équipe. Cela passe par leur communication, mais aussi par leur manière d'agir. Leur combativité et leur abnégation sont en effet des exemples sur le terrain, et les plus jeunes ressentent bien cela!


Nous pouvons encore citer trois autres caractéristiques majeures de cette faculté à guider les autres:

- une bonne communication: expliquer les choses calmement, mais aussi savoir recadrer fermement si nécessaire.

Ludo BRONIER est un "capi" positif , qui arrive à faire passer au groupe son envie. C'est également un rassembleur hors terrain. Steven GUEGUIN, pour sa part, sait dire quand c'est négatif, mais derrière, il essaye toujours de trouver une solution via des encouragements, un repositionnement...) (Sébastien TERLIN, coach de la RUS Beloeil, P1).

- à l'entraînement ou en match, pousser à l'effort, et montrer l'exemple à ce niveau.

- l'esprit d'équipe: faire passer l'équipe avant son égo, fédérer, rassembler.

Autant de qualités que Bryan LOSTERMAN, qui a en charge l'équipe B de la R.E. Acren-Lessines (P2), reconnaît à Geoffrey ROELANDT: 

Ayant une bonne compréhension du jeu et de la tactique, Geoffrey applique brillamment les consignes données et est un relais efficace pour les autres joueurs. Il est entreprenant, prend des initiatives favorisant la motivation sur et en dehors du terrain. Pendant la période de confinement, il était pro-actif sur notre groupe de communication pour proposer des séances de running afin de conserver condition physique, motivation et cohésion de groupe. C'est le porte-parole de la P2 auprès de Denis DEHAENE, le manager du club (soupers, équipement...). Geoffrey est aussi quelqu'un de très respecté et apprécié dans le groupe pour ses qualités footballistiques et humaines. 

           

                   Photo Nord-Éclair                                                                                Site du club

Si le coach reste naturellement le premier guide de son groupe, le mentor, celui qui doit montrer à la fois l'exemple et la ligne de conduite, on comprend à la lecture de tous ces témoignages à quel point il peut être précieux pour lui de pouvoir s'appuyer sur des relais forts, des "récepteurs-transmetteurs" compétents et de confiance.

Quand un entraîneur peut compter sur de bons leaders dans son effectif, il se sent beaucoup plus tranquille: tout le monde profite alors d'une aspiration vers le haut, grâce à un exemple contagieux (Gérard HOULLIER, Je ne marcherai jamais seul, p. 164).

 

jeudi 18 février 2021

Le capitaine, ce leader naturel

Captains

Dans son livre "Leading", Alex Ferguson - dont on ne peut douter qu'il fasse autorité en matière de leadership - développe un chapitre justement intitulé "Captains" (pp.102-106). Il y détermine 4 qualités principales attendues de ceux à qui il pourrait confier le brassard de capitaine:

- quelqu'un qui ait la faculté de diriger sur le terrain

- quelqu'un de confiance avec qui on puisse discuter

- quelqu'un que ses équipiers respecteront comme tel, et qui suivront ses instructions

- quelqu'un capable de s'adapter aux circonstances changeantes (par ex. lorsque les choses tournent moins bien)

Nous avons voulu confronter ces caractéristiques au vécu et au ressenti des acteurs de notre foot provincial. 

Voici donc le retour de quelques coachs et joueurs de la région.

Le respect de chacun

Commençons par Jonathan KRYS, T1 au Péruwelz FC (P1): Le capitaine est la personne de confiance, le bras droit, la personne-relais parfaite pour une communication fluide entre le staff et les joueurs, mais également le relais du coach sur le terrain. Ses mots doivent être justes et toujours dans le respect de chacun. Quand il s'exprime, on se tait et on écoute, car il aura toujours les mots justes, quelle que soit la situation, positive ou négative. Il est dès lors le rassembleur du noyau dans les moments importants. 


Photo Geoffrey DEVAUX (La DH)

Au PFC, Thibaut GUELTON est le capitaine désigné, et Sébastien MONTUELLE vice-capitaine:


                
                                                                        
                                                                               Photos La DH

Un choix primordial



Photo empruntée au site du club

C'est ensuite Luc PAUL, fidèle adjoint de Sébastien TERLIN à la RUS Beloeil (P1), qui nous décrit précisément le rôle généralement dévolu à Ludovic BRONIER: Un capitaine est un leader naturel (respecté par ses coéquipiers) qui se doit d'être le relais des entraîneurs sur le terrain. Il doit comprendre la tactique mise en place par le coach. Il doit aussi pouvoir booster ses équipiers durant les temps faibles, en cours de match. Mais le rôle du capitaine est tout aussi important en dehors du terrain. Il contribue à l'ambiance et à la vie de groupe, et n'hésite pas à pousser une gueulante, ou recadrer gentiment certains joueurs si le sérieux et l'application durant les séances ne sont pas optimales. Il dialogue avec le staff  et peut donner son avis sur certaines décisions s'il le juge opportun. Bref, la désignation du (bon) capitaine peut s'avérer un choix primordial pour un entraîneur...

En cas d'absence de Ludo, c'est Steven GUEGUIN qui le supplée: 

Il a l'avantage d'avoir joué à un niveau supérieur, possède un excellent sens tactique, est expérimenté (34 ans), écouté et respecté par l'ensemble du groupe (charisme naturel), et de par son poste de gardien de but, il a une vision du jeu et une anticipation des problèmes au-dessus de la moyenne. C'est un coach sur le terrain!


                              

Déjà capitaine durant plusieurs saisons à la JS MESLIN GM (P2), Ludovic BRONIER, 34 ans également, a donc rapidement hérité du brassard lors de son arrivée dans son nouveau club, en 2017. C'est un signe qui ne trompe pas quant à ses qualités naturelles de leader. Écoutons-le donc évoquer divers aspects de la fonction: 

Le plus important est de faire en sorte que le groupe vive bien, que toutes les individualités ne fassent qu'un. Guider les jeunes du mieux que l'on peut pour les intégrer dans le monde adulte. On sert un peu de tampon entre les joueurs et le staff: lorsqu'un joueur ou un coach est dans la réflexion ou le questionnement, c'est généralement vers le capitaine qu'on se tourne! Quand les résultats sont favorables, il est important de faire en sorte que tout le monde garde les pieds sur terre et, dans le cas inverse, il faut faire en sorte que personne ne baisse les bras et que tous se révoltent un maximum, même lorsque le moral est au plus bas. J'ai été élevé à l'ancienne et, pour moi, il est important d'inculquer cette mentalité aux plus jeunes. Se donner à fond, ne pas se prendre pour ce qu'on n'est pas, et surtout vivre de bons moments sur le terrain, mais pas seulement... Il y a la buvette aussi, c'est selon moi l'endroit où le groupe se solidifie.


Photos Thierry DAUSSIN

Montrer l'exemple

Cela fait des années que Pierre WANGERMÉE porte le brassard de l'AC ANVAING au bras gauche, d'abord en équipe A (P2), et à présent avec les jeunes de l'équipe B (P4). De par sa longue expérience dans ce rôle de "grand frère" (ce sont ses propres termes), son témoignage mérite lui aussi notre attention: 

Ce rôle de "capi" évolue avec le temps. Plus jeune, c'était davantage un rôle de relais du coach, style leader qui doit montrer l'exemple sur le terrain. Au fur et à mesure, on devient de plus en plus philosophe et on guide les petits jeunes. Beaucoup de relationnel entre les joueurs, le staff, les dirigeants, souvent pour arrondir les angles. Se serrer les coudes quand ça va moins bien est super important. C'est sans doute une des choses les plus difficiles comme "capi", ça vient avec le temps. Le foot est un sport d'équipe, il faut donc avoir confiance envers tes équipiers (et vice-versa). Je ne suis pas du style à crier "à tout va", mais plutôt à encourager et glisser un petit conseil  quand un équipier est dans le dur: "Allez, relève la tête, reviens à des choses simples!". Tout part de la confiance, en fait!


Capitaine emblématique et fidèle à son club de l'AC Anvaing (photo empruntée au site du club)



mardi 16 février 2021

Le programme des trois P

 Progrès, Plaisir, Performance: tel est le programme de formation concocté par la FFF, notamment sous la houlette de Gérard HOULLIER, alors Directeur Technique National. À destination des entraîneurs et formateurs, il énonce une évidente ligne de conduite qui peut inspirer les coachs de tous niveaux.

PROGRÈS


La clé d'un succès continu est une croissance constante 
(Phil JACKSON,  coach de basket cité par Marti PERARNAU, Pep Guardiola, The Evolution, p.162)

Si cette notion coule de source dans la formation du jeune footballeur, tant sur le plan individuel (apprentissage technique) que sur le plan collectif (apprentissage tactique), elle reste valable pour la post-formation et le football adulte.
Tous les spécialistes du coaching s'accordent à dire que mettre en place une culture de la progression est essentiel pour réussir. En cas de succès répété, le risque est bien réel de s'endormir et de se reposer sur ses lauriers. Qui n'avance pas recule pourrait-on dire alors: Un bon leader ne doit jamais se reposer sur ses acquis. (...) Se reposer sur ses lauriers, c'est faire machine arrière (Carlo ANCELOTTI, Mes joueurs et moi, pp.186, 208).
Ce constat est particulièrement vrai pour un entraîneur qui dure dans son club. Ainsi parle Diego SIMEONE: Je veux un Atletico compétitif, avec l'unique ambition d'améliorer ce qui a été fait l'année précédente (Mes secrets de coach,p.147).
D'où la nécessité de se renouveler, comme l'exprime Pep GUARDIOLA: Ce n'est pas suffisant de continuer à apprendre et grandir, vous devez aussi évoluer (p.205). Ce renouvellement implique dès lors d'être plus exigeant avec soi-même.

PLAISIR

On connaît "Le fun-football chez les diablotins" de Joost DESENDER et Gino CAEN, publié sous l'égide de l'URBSFA. Le genre d 'ouvrage qui traduit bien l'importance du jeu dans l'apprentissage des enfants: introduire de la compétition, compter les points, permettre à tous de jouer et encourager par un coaching positif, varier les activités, etc.


Mais cette joie de jouer est tout aussi indispensable chez les adultes et ce, quel que soit le niveau. Écoutons Arsène WENGER: Trop souvent un entraîneur a tendance à ne s'adresser qu'à l'adulte, avec des injonctions de performance, de victoire, de réflexion, au détriment de l'enfant qui joue pour le plaisir, dans l'instant présent. L'entraîneur doit s'adresser à l'enfant qui vit dans chaque joueur (Ma vie en rouge et blanc, p. 73).
D'où l'importance d'intégrer le jeu dans son programme d'entraînement: possessions avec appuis, 3c3 ou 4c4 + 2K sur double grand rectangle, courses-relais, défis, etc. Il est tout à fait possible de construire une séance intensive et rythmée tout en l'axant sur le ludique.

PERFORMANCE




Allier plaisir et performance n'est contradictoire qu'en apparence, surtout si l'on veut mener son activité sportive dans la durée. Développer une culture de l'effort, du travail, de la victoire, mais aussi de l'apprentissage par la défaite, reconnaître ses limites et chercher à les repousser.
Les plus grands champions ne sont jamais satisfaits d'eux-mêmes et se donnent constamment de nouveaux objectifs pour améliorer leurs performances. Ils peuvent être des sources d'inspiration pour des sportifs plus modestes.
Le même Arsène WENGER rappelle tout ce qui, au-delà de l'entraînement, peut contribuer à une culture de la performance, et que l'on a coutume de nommer la "préparation invisible": la diététique, les massages, la préparation mentale, le sommeil, la qualité de vie, l'entourage (p.71).
De nouveau, ce qui est valable au plan individuel, l'est tout autant sur le plan collectif. Le leadership du coach permet d'agir sur la performance d'un groupe. Nous reviendrons plus tard sur cette notion de leadership.


vendredi 12 février 2021

Fabien DELBEEKE, du foot professionnel aux séries provinciales

Lorsque l'idée nous est venue de rencontrer Fabien Delbeeke, le fil conducteur était de confronter son vécu de joueur professionnel à celui de coach dans le football amateur. Il n'est effectivement pas fréquent de croiser d'anciens pros dans les dug-out de Provinciale!

Dès l'âge de 21 ans, Fabien intègre le Noyau A de l'Excelsior Mouscron et accède à l'élite du football belge (1995). Niveau qu'il retrouvera avec La Louvière: 3 saisons en D2 (97-00), 2 en D1 (00-02). Viennent ensuite le SK Renaix (2 saisons en D2) et Wasquehal (1 saison en National 1), avant de poser ses valises pour 10 ans au Stade Luc Varenne (05-15). C'est dans le club tournaisien qu'il prendra pour la première fois en charge un groupe d'adultes.

Premiers pas au Futuro

Alors joueur pro à La Louvière, Fabien décide d'offrir ses services à Philippe SAINT-JEAN pour donner des séances d'entraînement aux jeunes pousses du Futurosport: "Lors des demi-journées où nous ne nous entraînions pas, je préférais occuper mon temps disponible en collaborant à l'École des Sports, où j'ai eu l'occasion de croiser de jeunes talents comme Maxime LESTIENNE ou Jeanvion YULU-MATONDO."

"Prenez des notes!"

Sa carrière de joueur lui a permis de travailler sous les ordres de fameuses personnalités. De quoi garder des influences déterminantes!

"De Georges LEEKENS, je retiens sa capacité à transcender les joueurs, ainsi que sa manière assez fine de distiller ses petites attaques personnelles. Daniel LECLERCQ, surnommé "le Druide", arrivé à La Louvière pour sauver le club de la relégation, était très exigeant. Il nous mettait une pression terrible à l'entraînement. Benoit THANS et Manu KARAGIANNIS devaient d'ailleurs souvent rassurer le jeune joueur que j'étais, me faisant comprendre que s'il était à ce point sur mon dos, c'était pour me tirer vers le haut. J'ai aussi pu apprécier toute la science tactique d'Ariel JACOBS, et la passion qui animait Jean-Marc VARNIER à Tournai."

Fabien n'est pas non plus près d'oublier sa toute première séance avec le Noyau A de l'Excelsior, sous la houlette d'André Van Maldeghem: "Au moment de faire les équipes pour une opposition, il m'a désigné en m'appelant Ding (Chose). Assez surprenant sur le coup (rires)!"

"Si j'ai un conseil à donner aux joueurs qui envisagent de se lancer par la suite dans le coaching, c'est de penser à recopier un maximum de schémas d'exercices, pour pouvoir les reprendre plus tard en les accommodant à leur propre sauce."



D'adjoint à T1

Fabien devient joueur - entraîneur adjoint en 2008 à la nomination de Christophe DENIE. Il le restera jusqu'au limogeage de ce dernier, redevenant simple joueur à l'arrivée d'Alex CZERNIATYNSKI en janvier 2010.

C'est suite à sa blessure aux ligaments croisés en 2014 que le RFCT lui confie les rênes de l'équipe. Une expérience qui ne sera pas simple, les années dorées étant passées (le manager Jean-Claude STOCMAN se retirera d'ailleurs en fin de saison).


Photo nordeclair.sudinfo.be

Proche des joueurs

"Au départ, je n'envisageais pas vraiment de devenir entraîneur principal. Je me voyais plutôt dans la peau de l'adjoint, dans ce rôle de relais, plus proche des joueurs. C'est justement ce que je retrouve et apprécie en Provinciale. J'aime bien chambrer les joueurs, déconner avec eux, leur mettre des petits ponts lors des toros, je m'éclate alors."

Savoir s'adapter

"La principale différence avec le foot en Nationale? Lorsque tu évolues au niveau des pros, tu as une obligation contractuelle de présence. Les staffs ont moins de surprises de dernière minute. Ici, tu peux préparer une séance pour 18 joueurs et te retrouver à 15 une demi-heure avant de commencer l'entraînement... C'est toi qui dois t'adapter à la provinciale, et pas les joueurs à toi."

Fun football

D'où l'importance de leur donner du plaisir pendant les séances: "À notre niveau, les joueurs viennent s'entraîner après leur journée de travail. Ils doivent aussi pouvoir se détendre, être heureux de retrouver les potes. C'est pourquoi j'essaye toujours que mes entraînements soient ludiques, mettant autant que possible l'accent sur le jeu. Tout se fait avec ballon."

Avec un peu d'humour, ça passe mieux!

D'aucuns lui collent l'étiquette de "trop gentil". Fabien sait pourtant dire les choses quand il le faut, mais à sa manière: "Je ne vais pas changer de personnalité parce que j'enfile le costume de coach. Je reste comme je suis. Et si je dois faire passer un message, je préfère le faire sous forme de boutade, ou en distillant une petite pique ou une piqûre de rappel lors des causeries."

D'abord le groupe

À la question de savoir quel est l'aspect le plus difficile de la fonction, Fabien répond sans hésiter qu'il s'agit de la sélection: "Parce que souvent le joueur pense qu'il est le meilleur que l'autre. Mais je n'ai jamais vu un coach qui alignait un joueur moins fort... Peut-être d'ailleurs que l'autre est intrinsèquement supérieur, mais qu'il apportera moins au groupe. Ce qui importe, c'est d'aligner l'équipe qu'on juge la meilleure à l'instant T. Il faut parfois savoir donner un signal fort en écartant un cadre, suite par exemple à une absence douteuse en semaine. Ceci dit, la porte de mon vestiaire est toujours ouverte. Mais il ne faut pas revenir chaque semaine me poser la même question. Parce que la remise en question personnelle semble déficiente chez certains. Si un joueur change de club chaque année soi-disant parce qu'il a eu de mauvais entraîneurs, il devrait se demander si ce n'est pas lui le problème...".

Cette primauté du groupe va de pair avec une modestie toute naturelle: "Je ne me sens pas vraiment personnellement décisif sur les résultats, ce sont les joueurs qui font le boulot, en mettant leurs qualités au service du collectif."



Le regard de l'adjoint

Depuis son arrivée à Obigies, Fabien peut compter sur l'appui d'un adjoint, Thierry COLIN. "C'est d'autant plus intéressant que Thierry connaît bien le club, particulièrement les jeunes dont il a supervisé la formation. Leur intégration progressive étant un des objectifs fixés au départ. Son apport est notamment précieux pour aborder la sélection. Le jeudi, Thierry couche son équipe sur papier, j'en fais de même de mon côté, et nous confrontons nos points de vue avant de décider. C'est précieux de pouvoir ainsi s'appuyer sur quelqu'un." 

Entraînements de correction

Fabien et Thierry se concertent également en aval du match, pour déterminer ensemble ce qui a moins bien fonctionné. C'est sur base de ces constats que le coach obigeois va orienter les séances de la semaine suivante. "Prenons l'exemple de la défense de zone: si nous ne sommes pas satisfaits de notre organisation défensive, nous allons envisager après l'échauffement un jeu de possession avec 4 petits buts, pour y mettre l'accent sur le coulissement et la couverture mutuelle. Nous enchaînerons avec des 2c1, puis des 3c2, avec l'idée pour le défenseur de protéger l'axe et d'amener l'attaquant sur le côté. Dans ce travail, le coaching du gardien est également très important. Viendra ensuite un 4c4, avec un défenseur qui sort sur le porteur du ballon, et les 3 autres qui viennent cadrer."

Jouer notre jeu

Les points d'insistance de Fabien à la théorie sont quasi uniquement axés sur son équipe. Pas de focalisation sur l'adversaire, et encore moins d'adaptation sur le terrain: "Je pense que ce serait montrer qu'on est inférieur, les joueurs peuvent le ressentir ainsi. On reste dans notre système et on sait comment on doit réagir en perte de balle. Dans notre 4-3-3, qui devient un 4-5-1 en B-, mes attaquants et mon 10 doivent se replacer le plus vite possible dans le bloc. Ma causerie est donc assez courte, les joueurs savent bien ce qu'ils doivent faire. Jusqu'aux rentrées en touche, qui sont travaillées à l'entraînement. Pas besoin d'insister sur l'adversaire, la plupart des joueurs se connaissent en P2! Nous devons juste essayer de développer notre jeu. Si on a tout donné et que l'adversaire était plus fort, il mérite sa victoire, tout simplement."

Marquage individuel

Fabien n'est pas un adepte de la défense de zone sur phases arrêtées. "C'est peut-être mon passé de joueur qui me fait préférer le bon vieux marquage individuel, mais j'estime qu'il est difficile de défendre à l'arrêt face à un joueur qui arrive lancé. Un grand costaud va toujours te bouger. Avec le "chacun son homme", tu es en contact avec ton adversaire direct, et tu peux le gêner dès le début du mouvement. De plus, si malheureusement nous encaissons, le fautif est facilement identifiable."



Témoignages

Michaël DUTRIEUX (T2 au RFC Tournai): Nous avons travaillé ensemble lors de la saison 2014-2015, la dernière avant une réforme en profondeur et la scission du foot néerlandophone et francophone. Le niveau de la série était donc encore très relevé, avec des formations comme Deinze, Oudenaarde, Gullegem. Bref, une bonne D3 nationale. Au niveau du noyau, Desire, Martin, Chantry, El Idrissi formaient l'ossature du groupe, avec beaucoup de jeunes joueurs inexpérimentés, et d'autres trop limités pour la division. Le club ne faisait pas un cadeau à Fabien avec l'équipe mise à sa disposition! Nous avions vite compris que la saison serait longue et compliquée. Malgré cela, nous avons réussi à prendre une vingtaine de points, avec des "exploits" à Londerzeel (un solide Top 5), contre Deinze, et un double succès face aux Géants Athois de Luigi NASCA. Lorsque Fabien a appris que j'allais être son adjoint, sans me connaître, il m'a accueilli les bras ouverts et m'a rapidement mis à l'aise. C'est un vrai gentleman, quelqu'un avec qui il est difficile de s'embrouiller. C'était sa première expérience comme coach, et surtout le long de la touche. Comme il venait de franchir la barrière, il prenait souvent part aux entraînements, notamment dans les exercices de possession de balle. Il ne faisait pas tache, que du contraire! Si bien qu'à un moment de la saison, on avait évoqué un retour dans le jeu pour guider les jeunes de plus près. Au niveau des séances, il se basait beaucoup sur son expérience, avec une dominante dans le travail de possession. Je m'occupais plus spécifiquement de la préparation physique, matière dans laquelle il ne se sentait pas vraiment à l'aise. Sur le plan tactique, il faisait également passer ce qu'il avait vécu quand il était joueur. Les joueurs le respectaient par rapport à son parcours, et ce qu'il représentait! Les supporters l'appréciaient également à sa juste valeur. À l'issue de la saison, il a quitté un club qui comptait beaucoup pour lui, pour rejoindre son village et l'OC Warcoing en P2. Je garderai un infini souvenir de mon expérience à ses côtés. Je découvrais le foot national, certes dans un rôle de T2 mais, malgré des conditions très difficiles, nous avons été jusqu'au bout (joueurs compris) en nous serrant les coudes, et très souvent avec beaucoup d'humour et de passion!

Aland MOTTE (équipier au RFC Tournai puis sous ses ordres à Warcoing): Au niveau de ses entraînements, je pense pouvoir dire que c'est le meilleur coach que j'ai connu. Il se base sûrement sur ses années d'expérience en pro, tous ses entraînements sont basés sur le jeu; même le physique, on le fait avec ballon. Tu ne vas jamais avec des pieds de plomb car tu sais que tu vas prendre du plaisir. Et malgré qu'il ait toujours été pro, il sait qu'en provinciale il ne peut pas être aussi exigeant que ça l'est au niveau professionnel.  Sa philosophie, c'est d'essayer au maximum le jeu au sol, en reconstruisant de l'arrière; il est partisan du beau jeu. Il préfère par exemple que le gardien relance sur ses arrières plutôt que de dégager un ballon sur ses attaquants. Ses théories d'avant-match ne sont ni trop longues ni trop courtes. Si l'adversaire a de grosses forces, il va en toucher un mot, mais pas s'y attarder; son objectif, ça n'est pas de s'adapter à l'adversaire, mais plutôt l'inverse. On a toujours joué dans le même système. Maintenant, c'est déjà arrivé qu'on passe à trois derrière en cours de match s'il fallait aller chercher un résultat, mais rarement. Après, il faut dire aussi qu'on avait une équipe pour jouer la tête. Parmi ses points forts, je dirais déjà qu'il connaît le foot, grâce à son expérience de joueur pro, mais que malgré ça tu ne l'entends jamais s'en vanter, comme j'ai déjà entendu par ailleurs certains "moi je"... Il est assez proche de ses joueurs, et n'hésite pas à blaguer avec le groupe. Son esprit un peu chambreur, ça rapproche tout le monde, et ça met un bon état d'esprit dans le groupe. Honnêtement, difficile de lui trouver un point faible, mais si je dois le faire je dirais parfois un peu "trop gentil".

Jérémy MARLIÈRE (capitaine d'Obigies): Fabien est très fort tactiquement, très attentif à l'organisation de son équipe. Chaque joueur reçoit des consignes précises en fonction de son poste. Il ne s'intéresse pas beaucoup à l'adversaire pour sa préparation de match, c'est vraiment focus sur son groupe. Le coach vit le match avec nous, replace sans cesse. 

                                                        
Photo Jean-Claude Goret

Il parle aussi beaucoup avec chacun. En tant que défenseur, c'est un bonheur pour moi car j'apprends encore beaucoup à son contact. Il aime le beau jeu et nous force à jouer au foot: toujours repartir au sol, du gardien. Les entraînements, c'est du ballon et du jeu; énormément de possessions, chaque fois avec un thème. Quand il lui arrive de jouer avec nous, c'est encore lui le plus fort, et ce n'est pas une blague! Si je dois lui trouver un point à améliorer? Peut-être trop gentil? Pas le style à pousser une gueulante. Même pour exprimer son mécontentement, il va le faire calmement.

Frédéric DEBAISIEUX (coach de Molenbaix, P1): Fabien est certainement une référence dans le coaching provincial, tant pour ses compétences dans le domaine que pour ses qualités humaines. Un exemple à suivre et un réel plaisir de le retrouver dans des confrontations pour échanger nos points de vue.

mardi 9 février 2021

Philippe BREYNE: "Laisser le moins possible au hasard"

Des titres à la pelle

C’est un coach au palmarès impressionnant qui est aujourd’hui à la tête du FC Béclers, en P3A Hainaut. À la lecture de son CV, on en viendrait à se demander comment le président Géry FLEURQUIN a réussi à attirer l’expérimenté tacticien mouscronnois, 60 ans depuis peu, « derrière le cimetière » : "C’est bien simple, je suis arrivé chez les Vert et Blanc par l’entremise de Dominique DEGELS, tenancier de la buvette et ancien collègue à la SNCB. "

Joli coup de filet réalisé par le club tournaisien, qui peut être fier d’avoir à la tête de son équipe un coach avec autant de bouteille et de titres à son actif.

"J’ai débuté chez les jeunes à Bas-Warneton, en 1981, et j'y suis resté 6 ans, avant de me lancer en adultes à Houthem, en P4. Je suis ensuite passé à l’Excelsior Mouscron, où j’ai eu la charge des Cadets et Scolaires Nationaux, puis des Juniors UEFA.

Vient alors la proposition de Templeuve, où nous décrochons d’abord le titre en  P2 (en 98), puis à l’échelon supérieur pour nous retrouver en Promotion en l’an 2000. Hélas, avec le départ du buteur CHRISTIAENS et la blessure de BEAUGRAND, l’expérience au niveau national tourne court".

C’est au Racing Lauwe que Philippe rebondira, successivement champion en P4 (2003) et P3 (2004) !

Retour à la Providence en 2005 pour offrir un autre titre à Templeuve (P2A, 2006). L’année suivante, la sortie est de nouveau brutale : "Avant une double confrontation face aux leaders, le président de l’époque m’a averti que pour être conservé, je devais réaliser un 4/6. Je lui ai aussitôt répondu qu’il pouvait coacher lui-même dès le dimanche suivant !"

Nouveau passage en Flandres, à Poperinge cette fois, dans un contexte très particulier où il se fait limoger en étant… 2e à un point du premier !

Nous pouvons encore épingler les lauriers obtenus en P2 avec Warcoing (2011), en P3 à nouveau avec le RC Lauwe (2014) et une accession en P1 via le tour final avec ce même club (2016) !

Jolie collection à laquelle on peut encore ajouter plusieurs titres obtenus avec ses équipes de jeunes!

Diplômé UEFA-A

"Après les 3 années de formation comme moniteur à l’ADEPS, j’ai comme on disait alors fait le Heysel, en néerlandais, successivement à Roulers, Gand et Bruxelles."

Jean-Dominique VESSIÉ, l’actuel coach de Templeuve (P2A), que Philippe a parrainé lors de sa propre formation à l’Union Belge, témoigne : "Philippe est un tacticien hors-pair ; son football est d’une efficacité redoutable, au-dessus de la moyenne. Je parlerais de rigueur dans un gant de velours. Capable de gérer des forts caractères, et de créer un groupe soudé et discipliné."

Bien connaître l’adversaire

Il faut faire en sorte que vos joueurs ne soient pas surpris, que tout leur semble du « déjà vu » (Arrigo SACCHI)

 "C’est très important en effet. À part peut-être lors de mon passage à Warcoing, je n’ai jamais été à la tête d’un club dominant les autres sur le plan financier. Quand tu n’es pas le plus fort en budget, le minimum est de s’intéresser à l’adversaire pour tenter d’annihiler ses forces et d’exploiter ses faiblesses. Même sans scout, il est toujours possible d’obtenir des informations via des coups de fil aux coachs amis dans la série."



C’est sans doute par sa propre expérience de scouting pour le Waregem d’Aimé ANTHEUNIS, champion de D2 en 1995, que Philippe a compris l’importance d'analyser minutieusement les autres formations. Aujourd’hui, à Béclers, il bénéficie de l’aide de son ami Didier LEGRAND, qui fut aussi son T2 à Warcoing, pour visionner l’adversaire. "Et le dimanche, je prends un maximum de notes, laissant à mon adjoint Denis PLASMAN le soin de donner les consignes." 



"Dans le vestiaire avant chaque match, Philippe dispose trois grandes feuilles A3: une composition probable de l’équipe adverse avec les points forts et points faibles de chaque joueur, même les réservistes. Une deuxième avec notre compo, comprenant une variante pour le passage à une défense à 3 au cas où l’adversaire joue avec 2 attaquants; quelques notes pour l’approche mentale, et une dernière feuille avec l’organisation sur phases arrêtées." (Romain DONNEZ).

Les phases arrêtées

"Tout le monde connaît leur importance, même à notre niveau. En préparation et lorsque la météo le permet, nous les travaillons régulièrement, une demi-heure en fin de séance. Il n'est pas rare de nous voir travailler jusque 21h45 en été! Évidemment, plus tu descends de niveau, plus c’est difficile de travailler en semaine, compte-tenu des absences. Mais nous marquons pas mal sur phases arrêtées (46,7% des buts en 2019-20). Nous développons toujours 3 variantes, que les joueurs identifient grâce à de petits signaux. Ils ont des lignes de course bien déterminées. Défensivement aussi, chacun sait ce qu’il a à faire (pour la même saison, la moyenne tombe à 38% des buts encaissés)."

                     

Vous l’aurez compris, rien n’est laissé au hasard dans le travail de ce passionné. "Je garde en effet tous mes rapports de matchs, ainsi que les articles de presse concernant la série dans laquelle j’officie."

Un autre de ses joueurs, Louis DEPARIS, confirme l'enthousiasme intact de son coach: "J’aime aussi particulièrement sa pré-analyse le mardi et le jeudi après l’entraînement, avec ses 4, 5 ou 6 cafés noirs avec sucre (impossible de lui offrir autre chose) à 22h ! À mon avis, ça l’aide à continuer son analyse pendant la nuit (rires)."

Un regret

En 2015, un an avant sa retraite professionnelle, Philippe aurait pu devenir l’adjoint de Fred VANDERBIEST au KV Oostende. "Bart MAES, ex-joueur du Club de Bruges, coachait les Espoirs de Lauwe, et nous faisions des séances communes pendant la préparation. Épaté par la méthodologie employée – il disait n’avoir jamais connu de tels entraînements -, il m’a mis en contact avec Luc DEVROE, alors directeur sportif du club. Nous nous sommes vite accordés sur les termes d’une collaboration, mais hélas nous avons appris que le règlement exigeait un détenteur de la licence Pro, le T1 ne l’ayant pas encore obtenue. C'est ainsi Chris Janssens qui a obtenu le poste." 

Le métier de coach

Denis PLASMAN, T2, témoigne à son tour: "Je me souviens d'une rencontre perdue à Templeuve où les consignes défensives pour s'occuper de Malik ATTOUT ont porté leurs fruits jusqu'à dix minutes de la fin, moment où nous nous sommes éteints physiquement. C'était peu après son arrivée chez nous, en P2, et l'un de nos équipiers avait... oublié les maillots! Philippe s'est alors demandé où il était tombé... Le schéma tactique mis au point pour attirer l'attaquant vers nos défenseurs centraux davantage capables de le mettre sous l'éteignoir, nous avait permis de croire à la victoire jusqu'à 10 minutes de la fin. Je pense que c'est la première fois que l'équipe a pu se rendre compte de ce qu'était le métier de coach." 

Vivement la reprise!

C'est une chance incroyable pour la P3A Hainaut de compter en ses rangs un coach aussi titré - et pourtant si simple et accessible - que Philippe. À présent qu'il connaît mieux son groupe et la série, nul doute que Béclers ne fera pas que de la figuration lors du prochain championnat, que nous avons tous hâte de voir arriver...

dimanche 7 février 2021

"Eine sehr gute Mannschaft"

 "Nous sommes actuellement une très bonne équipe" (Site internet du club). Adolf Hütter (le diminutif Adi sonne sans doute plus sympathiquement!), le coach de l'Eintracht Francfort, a exprimé une satisfaction on ne peut plus logique après un impressionnant 19 sur 21 en 2021.


D'abord entraîneur de jeunes, puis adjoint et enfin T1 en Autriche, le technicien autrichien de 50 ans obtient le titre de champion de Suisse en 2018 avec les Young Boys de Berne, ce qui lui vaut de découvrir la Bundesliga avec les Aigles de Francfort.

Ancien médian axial, il est visiblement un adepte du football offensif. Son système de prédilection est le 3-4-2-1. Avant son arrivée, sous l'ère Kovac, le compteur buts du club renseignait un total de 34 en 15/16, 36 en 16/17 et 45 en 17/18. En comparaison, le bilan "buts pour" de Hütter est de 60 en 18/19, 59 en 19/20, et aujourd'hui déjà 41 buts après 20 matchs!

Lors de sa première saison, il a permis à Jovic d'inscrire 17 buts (et d'obtenir un transfert au Real). Il révèle ensuite le Portugais Andre Silva, 28 buts en championnat depuis 2019.


samedi 6 février 2021

Les changements, à quel moment? La règle du <58<73<79

 "La saison est longue", "on aura besoin de tout le monde", "un match ne se gagne pas à 11", tous les coachs connaissent ces discours de vestiaire destinés à maintenir la motivation des déçus qui se retrouvent sur le banc des réservistes.

Il est vrai pourtant que, dans bien des cas, injecter du sang neuf, des fresh legs comme on dit outre-Manche, peut inverser le cours d'un match. Que ce soit pour faire une différence individuelle avec du poste pour poste, ou pour mettre en place un autre système tactique, un coach a besoin de solutions de rechange sur le banc, à savoir de joueurs bien décidés à prouver que leur place est sur le terrain et à (re)gagner leur statut de titulaires.


Pour réussir, toute grande équipe a besoin de bons remplaçants.
(Marti PERARNAU, Pep Guardiola, The Evolution, pp.338-339)

Dans une étude basée sur d'innombrables données statistiques, ouvrage justement intitulé The numbers game, Chris Anderson et David Sally révèlent une constatation intéressante concernant le timing des changements: "Dans toutes les compétitions, la règle du <58<73<79 offre un plus grand espoir de comeback que tout autre modèle de changements." (p.238)
À savoir, donc, faire intervenir le premier changement avant la 58e minute, le suivant avant la 73e, et le dernier avant la 79e. 
Selon ces analystes, la probabilité de revenir dans le match augmente dans une proportion de 20 à 35% par rapport à des changements intervenant plus tard dans le match. 
Ce n'est évidemment pas une recette miracle, mais le constat démontre tout l'intérêt qu'il y a à ne pas trop traîner avant de se décider à intervenir.
Diego Simeone confirme d'ailleurs l'importance cruciale pour un staff du début de deuxième mi-temps:


Le moment le plus important pour un entraîneur 
intervient entre la 10e et la 20e minute de la seconde mi-temps
(Diego SIMEONE, Mes secrets de coach, p.109)

S'il peut être compréhensible de vouloir maintenir sa confiance dans le onze de départ, il serait toutefois prudent de ne pas s'entêter, ni tergiverser outre mesure dans sa prise de décision. Dans cette optique, les stratégies de substitution sont évidemment prévues avant le coup d'envoi.
Lorsque le cours du match est effectivement inversé, on peut alors parler de coaching gagnant. Les plus grands le font avec modestie, à l'instar de Gérard Houillier qui confiait à Daniel Riolo dans son livre "Secrets de coachs": Un entraîneur doit rester humble dans ce domaine. Par moments, vous sentez qu'un coaching peut vous faire gagner un match. Parfois ça marche, parfois non! Mais ça fait partie des ingrédients du succès d'avoir un peu de feeling. C'est votre expérience et votre expertise qui vous apportent ça (p.150)



jeudi 4 février 2021

Bienvenue sur mon blog dédié au coaching

J'ai créé ce blog pour vous faire partager ma passion pour le coaching, qui m'a amené au bord des terrains pendant plus de 20 ans. Aujourd'hui, j'ai décidé d'aller à la rencontre des coachs, essentiellement de Wallonie Picarde, d'observer et de relayer leur travail, mais aussi de vous partager le vécu et les réflexions des entraîneurs et formateurs de tous horizons.