On estime à près de 300 000 personnes le nombre de Belges d’origine italienne résidant dans notre pays! Suite aux accords charbon dont on vient de fêter le 75e anniversaire, l’immigration italienne marqua en effet les années d’après-guerre et le travail dans les mines.
Ce quart de finale Italie – Belgique, en plus de proposer une magnifique
affiche sportive, présente une forte connotation affective pour toute une
frange de notre population.
Plusieurs coachs aux racines transalpines ont accepté de préfacer pour nous cette rencontre si particulière pour eux.
Voici les questions que nous leur avons posées :
1. La Squadra a souffert plus que prévu face à l’Autriche. Pourtant,
elle transpire la confiance suite à sa longue invincibilité, non ?
2. Quels sont selon vous les points forts les plus évidents de cette
équipe ?
3. À quels niveaux pensez-vous que les Belges puissent surprendre les
Italiens ?
4. Un seul but encaissé jusqu’ici par Donnarumma, et encore, dans les
prolongations. Un seul aussi pour Courtois. Doit-on craindre un match
fermé ? Qu’est-ce qui selon vous, pourrait le faire basculer ?
Felice
MAZZU
© sudinfo.be
Fraîchement
promu en D1A avec la Royale Union Saint-Gilloise, le technicien carolo possède un
important vécu au plus haut niveau de notre football. Il endosse par ailleurs
régulièrement le rôle de consultant sur RTL Sport.
Felice
a sorti en 2018 un ouvrage intitulé « Papa, je te promets qu’un
jour », dans lequel il retrace sous la plume du regretté Jean Derycke, son
parcours de fils d’immigrés italiens. Voici ce qu’il y écrit : « J’ai
le sentiment d’avoir pris une revanche sur la vie de mon papa. Lui qui a vécu
dans une des plus tristes maisons du monde, qui a tout quitté pour travailler à
la mine, puis à l’usine. Qui a dû attendre d’avoir plus de 50 ans pour
s’acheter une voiture, qui ne nous emmenait pas, ou si peu, en vacances… Tous
les sacrifices que mes parents ont faits, on ne peut pas les oublier. »
1. Je relèverais d’abord les évidentes qualités intrinsèques de
l’Autriche, d’un très bon niveau. Son bloc haut a par moments embêté l’Italie.
Ses joueurs de taille ont également posé problème. Peut-être manque-t-il aussi
à la Squadra un véritable buteur ?
2. La vivacité, le pressing et la solidarité.
3. De manière générale, dans les transitions B- B+. Ou encore sur les
phases arrêtées. Plus précisément, par la vitesse sur les deux défenseurs
centraux, ou encore dans le dos du latéral gauche, Spinazzola étant très
offensif.
4. Je prévois un début de match fermé tactiquement, et ça sera le cas
tant que le score restera vierge. Les transitions seront le paramètre le plus
important pour les deux équipes. L’efficacité de la ligne d’attaque belge, que
j’estime supérieure, pourrait faire la différence.
Fabrice
MILONE
© site de la REAL
Fabrice a récemment intégré le pôle d’entraîneurs de la Royale Entente Acren-Lessines (D2 amateurs).
C’est son nonno (grand-père) qui est venu en Belgique pour y
travailler à la mine, à Marcinelle très exactement.
1. Il y avait un gros bloc en face, les Autrichiens étaient costauds
physiquement, ils ont mis l’impact, jouant avec un cœur gros comme ça ; c’est
ce qu’il fallait faire pour ennuyer la Squadra. Les Italiens sont en confiance certes,
mais peut-être pas si sereins que ça. Beaucoup de tifosi estiment qu’il manque
un peu d’efficacité en attaque et d’équilibre entre les flancs, le droit
pistonnant moins.
2. Un bloc et une mécanique bien huilée. Tactiquement, ils savent tous
ce qu’ils ont à faire. Une ligne défensive avec beaucoup d’expérience, un
milieu de terrain avec un Jorginho au four et au moulin. Spinazzola, la révélation, qui arpente inlassablement son flanc gauche et invite Insigne à rentrer dans
le jeu. Et enfin Chiesa, que je vois débuter à droite.
3. Les Belges pourraient surprendre via Romelu face au manque de vitesse
de l’axe défensif. De Bruyne est le magicien de cette
équipe. À voir s'il sera rétabli à temps. À 100 %, c’est le gars capable de faire basculer le match.
4. Je ne m’attends pas à une rencontre fermée, mais au contraire spectaculaire
et très ouverte. L’envie de jouer vers l’avant des deux côtés, un football
offensif avec des flancs qui n’hésitent pas à sortir, et une belle bataille
d’entrejeu.
Marc
SEGATTO
© lameuse-huy-waremme.sudinfo.be
Après
avoir exercé comme formateur au Standard de Liège et suivi sa formation UEFA A
en compagnie de Thierry Witsel, Marc entame sa 10e saison ( !)
de rang au RCS Verlaine (D2 amateur). C’est un petit-fils d’immigrés italiens
1. La Squadra a été mise en difficulté à l’une ou l’autre reprise, mais
je ne trouve pas qu’elle ait souffert sur l’ensemble du match. Cette victoire
fut difficile mais méritée, même si l’Italie l'a échappé belle sur le but
annulé ou sur une suspicion de pénalty.
2. Je crois que les Italiens peuvent nous faire mal par leurs flancs,
qui sont très forts physiquement. Quel volume de course, je serais curieux
de connaître leur vma ! Qui plus est, ils sont très rapides et savent
jouer au ballon ! J’espère que Mancini gardera la même ligne de conduite, avec Chiesa comme joker. Il faut tenir compte de leur détermination,
leur envie et leur amour du pays. C’est une jeune équipe qui a une grande faim…
3. La Belgique peut les embêter en les privant de ballon. Je crois aussi
que malgré le vécu et l’expérience des défenseurs centraux, Lukaku devrait leur
poser des problèmes. Sur leur côté gauche, il y a parfois de l’espace dans le
dos de Spinazzola car il sort beaucoup, ce sera peut-être un point faible à
exploiter. L’expérience et la patience des Belges devraient être des atouts. Si
nous parvenons à avoir des reconversions rapides, nous devrions faire mal.
Donnaruma a un très bon jeu au pied mais prend beaucoup de risques, c’est
encore un élément à prendre en considération.
4. Il y aura sur le terrain deux des meilleurs gardiens du monde, c'est une des raisons pour lesquelles ils prennent peu de buts. Je ne crois pas que ce sera un
match fermé, ce n’est pas dans la culture des deux coachs. Lors de la deuxième
mi-temps face aux Portugais, nous ne pouvions plus sortir mais ce n’était pas
par choix ! Dans ces matchs couperet, la forme du jour et la chance sont significatives. Tout le groupe devra être à 120%, car en face, la détermination sera
totale, c’est une certitude…
Gino
D’ANGELO
lanouvellegazette-centre.sudinfo.be
Surprenant
promu en P1 hennuyère avec son club de Morlanwelz à l’issue de la saison
2019-20, Gino est lui aussi petit-fils d’immigrés italiens
1. Certes, mais le défi physique imposé par les Autrichiens a contrarié
la Squadra.
2. Collectif, rigueur, générosité dans les efforts, qualités techniques.
3. L’impact de Romelu pourrait faire mal à la défense italienne.
4. De fait, je pense que le match sera fermé et se jouera sur un détail.
Gino
CASSAMASSA
© laprovince.sudinfo.be
Entraîneur
bien connu de la région montoise (à Tertre-Hautrage notamment), aujourd’hui à
la retraite après plus de 40 ans de coaching, Gino est fils de mineur. Son papa
est arrivé à Tertre il y a 70 ans
1. Effectivement, je trouve qu’elle a souffert plus qu’attendu,
l’Autriche ayant su imposer un combat physique énorme.
2. Organisation, solidarité, groupe très compact.
3. Je pense que l’immense joueur qu’est Lukaku peut faire la différence
à tout moment. Eden Hazard et Kevin De Bruyne, s’ils sont rétablis, peuvent
être déterminants, ainsi que Vermaelen et sa défense s’ils peuvent reproduire
la prestation du Portugal. Sans oublier Courtois, meilleur gardien du monde.
4. Il y aura une très grosse organisation des deux côtés, sauf si une
des deux équipes marque rapidement. L’équipe qui ouvrira le score aura un gros
avantage. À mon humble avis, il n’y aura pas beaucoup de buts dans ce match.
Nicolas
LONGONI
Nicolas
possède une expérience appréciable dans le coaching féminin. Il s’occupait
encore de l’équipe d’Havinnes il y a trois saisons, avec un doublé coupe-championnat et une accession à la Nationale, avant de prendre un break
afin de pouvoir suivre son épouse et ses enfants, qui jouent tous trois. Ses
arrière-grands-parents sont arrivés après la guerre à Bruxelles, pour y gérer
une glacerie. Il est d’ailleurs lui aussi Bruxellois de naissance. Suite à une
séparation, son papa est retourné vivre en Italie, sa maman et lui étant
aujourd’hui installés dans la région lessinoise
1. Il ne fallait certainement
pas sous-estimer cette équipe autrichienne qui est composée de quelques joueurs
de qualité évoluant en Bundesliga. Les Italiens ont eu beaucoup de difficultés
à répondre au défi physique et à l’engagement proposés par leurs adversaires,
sans doute aussi par manque d’efficacité et de rapidité dans les transmissions.
La Squadra reste sur une série impressionnante de résultats positifs et a donc
acquis assurance et confiance, dans leurs atouts essentiellement collectifs.
2.
Une équipe joueuse, qui prône un football dominant dans la mesure du possible
et une récupération haute par un pressing direct et rapide, afin d’éviter les
reconversions adverses. Une équipe mariant expérience et jeunesse. Pas de stars
mais un collectif, un noyau qui vit en parfaite harmonie.
3.
Tout d abord par son système en 3-5-2 qui pourrait permettre aux joueurs de couloir de profiter
de l’espace créé par l’apport constant des latéraux italiens (surtout Spinazzola).
Ensuite, par des reconversions rapides et une justesse technique.
Enfin et surtout par l'entremise de Romelu Lukaku qui risque d’user les anciens de notre
défense centrale.
4.
Je pense au contraire voir un match ouvert avec deux équipes qui auront cette
volonté de monopoliser le cuir, mais également la faculté de faire mal par des contres
rapides. Deux gardiens qui encaissent peu, de par un jeu dominant et bien évidemment par leur talent personnel puisque naturellement deux des
meilleurs du monde. Je m’attends à un match agréable à regarder grâce à deux
équipes joueuses et cependant difficiles à bouger.
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