Pour ceux que l'on appelait auparavant Cadets, Scolaires et Juniors, terminées les compositions réduites, on joue à présent dans la configuration du foot adultes. Dès la catégorie U14 en effet, les lois du jeu appliquées sont les mêmes, à l'exception de la durée des mi-temps (2x35 jusqu'en U15, 2x40 jusqu'en U17, puis les 2x45), du nombre de remplaçants (5) et des changements illimités.
Plusieurs
formateurs, un pour chaque tranche d’âge, se sont prêtés au jeu de répondre à nos questions pour cibler les principales caractéristiques de leur catégorie. L’objectif n’est pas de faire un
tour complet de la question, mais de mettre en lumière le travail d'éducateurs
dévoués qui préparent avec passion les joueurs de demain. Passion et
compétence, comme vous pourrez vous en rendre compte !
François BROGNIEZ, U14 Interprovinciaux
Royal Francs Borains
27 ans, diplômé UEFA B, termine actuellement le bloc 1 de l’UEFA A. Va aborder la formation Élite Youth en deuxième année. Après
son parcours de joueur au RFB, a débuté le coaching avec les plus jeunes (U6
à U8), et en est à sa quatrième saison en U14, se faisant ainsi un spécialiste de cette année charnière. François est également, comme son ami Antoine DELAYE qui l'a rejoint cette saison au club, arbitre en
D2 amateur !
Comment les enfants qui
viennent du jeu à huit vivent-ils la transition au foot à onze ?
Très
bien. Ils arrivent dans le vrai football, celui qu’on voit à la télé, sur un
terrain entier, avec de grands buts. Les enfants sont très motivés et ont une
grande soif d’apprendre. Concentration et application vont de soi chez eux,
tant ils sont spontanément captivés. Bien sûr, certains sont plus vite prêts
que d’autres à évoluer sur grand terrain, étant donné les niveaux différents de
maturité physique et de coordination.
Comment t’y prends-tu
pour leur apprentissage tactique ?
Le
schéma le plus abordable est incontestablement le 4-3-3, idéal pour leur
apprentissage. Le quatre arrière notamment, indispensable pour leur permettre
de couvrir la largeur du terrain, un paramètre nouveau à cet âge. La
familiarisation à d’autres systèmes de jeu leur viendra suffisamment tôt, à un
moment où il sera plus facile de les moduler.
Pour
l’initiation tactique, nous avons la chance de pouvoir organiser un stage de
cinq jours en avant-saison, à Beauraing. Nous y jetons les bases du plan de
travail : apprentissage du bloc-équipe, de la zone, mise en place des
phases arrêtées, etc. Avec trois séances par jour, on avance vite !
Nous
avons aussi l’occasion d’y tester les joueurs à différents postes et d’ainsi
cibler les profils. Même si rien n’est figé, nous distinguons facilement les
joueurs de flancs et les axiaux, surtout dans la continuité de ce qu’ils ont
fait dans le jeu à huit.
Ce
stage a aussi le grand mérite de créer des affinités; c’est le genre d’expérience
qui laisse des souvenirs impérissables. J’ai d’ailleurs eu moi-même la chance de participer à de semblables séjours en
Ardennes et les coachs de l’époque m’ont donné l’envie de me lancer à mon tour
dans l’organisation.
Nous poursuivons le cheminement durant la saison, sous forme de jeux de possession, ou de formes de match.
Quels sont les points
d’insistance dans la planification de ton travail ?
Énormément
de ballon, bien sûr. Il faut que les enfants le touchent au maximum. Nous avons
trois séances hebdomadaires :
-
le mardi, je reçois l’aide de deux amis kinés qui viennent faire de la
préparation physique adaptée aux enfants, par groupes de niveaux
-
le mercredi, on peut mettre un peu plus d’intensité dans les jeux et exercices
-
le vendredi est davantage axé sur la préparation du match, avec des démarquages sur
de plus grandes surfaces, mais en veillant à bien doser les efforts
Nous
faisons passer trois tests VMA aux enfants: avant le stage, à la mi-saison et à la fin de celle-ci, dans le but qu’ils connaissent leurs limites. Nous
surveillons aussi leur évolution physique (taille, poids…).
Nous
avons par ailleurs acquis des pieds téléscopiques pour les filmer et leur proposer de
petites séances vidéo.
Mon
optique est de donner aux enfants le maximum d’outils de formation. Certains
trouveront peut-être que c’est exagéré, mais j’essaye de les préparer au mieux.
Mes successeurs ont ainsi la tâche facilitée (rires).
Christophe PRÉSEAUX, U15 Élite
2 Royal Excel Mouscron
40 ans, diplômé UEFA A. A
été adjoint de Thierry PISTER et Carl DEVIAENE au RFC Tournai. À Mouscron pour
la troisième saison. Formateur professionnel, Christophe travaille le matin
pour l’ACFF où il assure avec Michel DEROUCK les séances pour les jeunes Élite
de 15 à 21 ans qui sont dans les écoles de Mouscron. Le soir, il coache les U15
de l’Excel, mais s'occupe aussi des U14 aux U21.
Comment le travail est-il
organisé dans un Centre de formation comme le Futurosport ?
Nous
tournons beaucoup, en ateliers. Un joueur a plusieurs formateurs. L’objectif
est que, sur une saison, il ait pu travailler avec trois, quatre, cinq voire six formateurs. L’approche est déjà très professionnelle à cet âge. Mais le jeu
reste fort présent. En plus des bases techniques qui sont régulièrement
entretenues, nous travaillons beaucoup les possessions et les formes de match.
L’élaboration tactique
est-elle déjà fort poussée ?
Chez
nous, la formation est plus importante que le résultat. La mise en place est
progressive. Par exemple, nous déterminons déjà les lignes de course
offensives, en vue des U19-U21.
Philippe
SAINT-JEAN nous demande de travailler en 4-3-3. Mais nous avons la latitude de
changer occasionnellement en cours de match. Il m’est déjà arrivé lors de certaines rencontres où
cela s’y prêtait de tester le 3-5-2 ou le 3-4-3 pour leur inculquer d’autres
notions tactiques.
Une caractéristique
t’ayant plus particulièrement marqué chez les U15 ?
Les différences énormes de maturité. Des ados présentant une morphologie quasi adulte côtoient des gamins en début de croissance. Il faut prendre ça en considération. Si les premiers marquent les esprits par leur puissance technique et physique, nous devons veiller à ne pas passer à côté de joueurs à haut potentiel mais pas encore matures.
J’y
suis d’autant plus sensible que c’était mon cas ! À seize ans, j’étais le
plus petit de mon équipe, et en U21 le plus grand ! Ce n'est qu'entre dix-sept et dix-neuf ans que j’ai connu une
croissance tardive et spectaculaire.
Comment arrivez-vous à
gérer la situation particulière de cette période ?
C’est
difficile, bien sûr. Sans match, c’est très frustrant. Nous avons pu continuer
à travailler par bulles de quatre, puis de dix, c’est déjà ça, mais ça ne
ressemble que de loin à ce que nous pouvons offrir et vivre lors d’une saison
normale.
Laurent MEGANK, U16 Interprovinciaux
Div. 1 CS Pays Vert Ostiches-Ath
47 ans, diplômé UEFA B,
12 ans de coaching (Biévène, Neufvilles et au Pays Vert depuis 3 ans), champion
l’an passé avec ses U15 en interprovinciaux D2, Laurent coachera encore ce
groupe la saison prochaine en U17. À côté de ses fonctions au PVOA, il
travaille aussi pour l’ACFF (vérificateur Label) et pour le Sporting d'Anderlecht (scouting).
Quelles spécificités
constates-tu dans cette catégorie « Scolaires 1e
année » ?
De
grandes disparités physiques. Des jeunes plus frêles peuvent se retrouver face
à des « adultes » d’1m82, 83… On commence aussi à voir apparaître les
blessures musculaires.
D’où le recours au
stretching ?
Oui,
nous procédons à de petits étirements, le plus souvent actifs, après
l’échauffement, et des étirements passifs plus poussés en fin de séance.
Et sur le plan
tactique ?
Avec
trois entraînements/semaine, nous pouvons déjà bien travailler tactiquement. En
général, ils maîtrisent déjà correctement les bases du 4-3-3 après leurs U14-U15. La
saison dernière, nous avons quasi tout le temps évolué en 3-5-2. En U16, les longues diagonales sont plus fréquentes, ils y sont donc plus à l’aise avec une défense à
quatre. Je leur ai déjà annoncé que l’an prochain, nous testerions le 4-4-2, à
plat ou en losange, histoire d’étoffer leur bagage tactique.
Comment organises-tu le
travail physique ?
Je
maîtrise les notions de base acquises à l’école d’entraîneurs. Mais pour la saison
prochaine, j’ai proposé au club de réserver une séance hebdomadaire à la
préparation physique. C’est Laurent DE CNOP qui devrait s’en charger pour les
U17 et les U19.
As-tu constaté une évolution
dans l’esprit de compétition ?
Oui,
énorme. C’est logique à partir du moment où il y a un classement. Viser la
montée ou éviter la descente, c’est la carotte du championnat. Tous les points
comptent. Un exemple, en octobre dernier, pour ce qui aura constitué l'ultime rencontre avant
l’interruption Covid, nous nous déplacions à Wanze/Bas-Oha, leader de la série. Or, nous
n’avions jusqu’alors obtenu qu’une victoire en quatre matchs. Menant 1-2 à une dizaine
de minutes de la fin, j’ai décidé de renforcer mon secteur défensif pour
conserver ces points précieux. Une précaution que je n’aurais sans doute pas
prise en l’absence de classement. L’obligation de résultat est relative mais
réelle.
33 ans, s’est lancé dans
le coaching dès l’âge de 19 ans. Diplômé UEFA B, formation suivie au CRAF de Liévin.
Passé par toutes les catégories de jeunes en France, arrivé à Luingne il y a
trois ans. Est monté de U16 à U17 avec son groupe, et va les suivre en U19.
Aimerait passer son UEFA A en Belgique.
Qu’est-ce qui te frappe dans
ces catégories « Scolaires » ?
Entre
15 et 17 ans, il y a d’incroyables différences de morphologie. La croissance peut faire que des petits
techniciens ont des difficultés motrices à se réadapter à leur corps
qui évolue.
Le travail tactique y
est-il déjà fort présent ?
J’ai
des joueurs avec d’évidentes aptitudes techniques. Mais ce qui m’a frappé au
début, ce sont les nombreuses lacunes tactiques. Par exemple dans
l’apprentissage de la défense de zone, ou en voyant un arrière latéral toujours
défendre côté ligne. Les déplacements du bloc-équipe sont également
primordiaux. En interprovinciaux (c’était le cas en U16), on est vite puni si
ce n’est pas au point.
J’adapte
mon schéma tactique aux qualités des joueurs. Le club mise généralement sur le
4-3-3, mais je lui ai dernièrement préféré le 3-4-3, notamment pour me permettre
d’aligner de concert trois excellents défenseurs centraux.
Comment construis-tu tes
séances ?
L’essentiel
se fait avec un ballon. À part l'une ou l'autre séquence de 15/15, en début de
saison particulièrement, très peu d’exercices sans ballon. La course doit être
football. On voit rarement en match un joueur courir 40 mètres sans ballon. Beaucoup de jeux
réduits, qui amènent un maximum d’intensité. Des oppositions 2c1, 3c2 sur
petites surfaces, des jeux de conservation (variantes de passes à 10,
stop-ball, jeu à 4 buts, etc.).
Notre formation est fort axée sur le mouvement, la technique, les passes redoublées,…
Les
gardiens ont leur entraînement spécifique à part, ce qui signifie que je les ai
toujours à ma disposition. Soit ils sont dans le but, soit ils sont inclus
dans les exercices pour travailler leur jeu au pied.
Je
responsabilise mes joueurs pour l’échauffement qu’ils font par groupes de trois
ou quatre, ou pour la récupération, dont je leur parle beaucoup, notamment en
leur conseillant les étirements sous la douche.
Quel type de relations entretiens-tu avec tes joueurs ?
J’ai
beaucoup de discussions avec eux. À leur âge, les soucis d’école ou d’ordre
privé sont fréquents. Il faut pouvoir les écouter. Je peux entendre qu’un jeune
traverse un passage difficile qui nuit à son implication dans le foot. Et puis
il y a les sorties… il faut jongler avec tout ça. Mettre trop d’interdits ne ferait
qu’exacerber la tentation de les enfreindre. Par contre, on peut tenter de les sensibiliser aux conditions mentales pour accéder au foot seniors. J’essaie toujours d’apporter une touche d’humour, qui
permet de décompresser.
62 ans, diplômé UEFA A
depuis 2004, a aussi suivi des formations aux Pays-Bas sur la périodisation
physique et tactique, ainsi que sur la préparation physique. Il a débuté sa
carrière en 1996 au KV Woluwé-Zaventem, avant de s’occuper des jeunes nationaux
(U16, 17, 19) à Diegem Sport. À la REAL depuis 2018 (U16 puis P2 et D2). Une
vingtaine d’années d’expérience chez les adultes. Il prendra d’ailleurs en
mains les destinées de la P1 de l’Excelsior Biévène la saison prochaine.
Considères-tu ton travail
comme de la post-formation ?
À
partir du moment où le jeune est en âge d’arriver en équipe première (16 ans),
on peut effectivement parler de post-formation. Les entraînements que je leur
dispense sont les mêmes qu’en adultes, pour écourter le chemin. C’est aussi
pour cela qu’en match, j’évite les changements incessants, afin de les préparer
au futur.
La
saison prochaine, la plupart de mes joueurs seront des deuxième année. Parmi
eux, sept ou huit devraient par la suite intégrer le noyau de P2, et quelques-uns peuvent même viser un peu
plus haut. Le talent y est. Il ne suffit pas, mais c’est une base nécessaire.
D’ici quatre ou cinq ans, l’objectif est qu’il y ait dans le groupe P2 une
quinzaine d’éléments de Deux-Acren.
Un
de nos gros avantages est que notre D2 amateur nous permet d’aligner des
Espoirs, où le rythme est plus élevé et le terrain souvent plus grand. Nos jeunes
y ont l’occasion de se frotter à des adultes de niveau national.
En quoi peux-tu encore
les faire progresser ?
Nous avons toujours le souci de les faire progresser. Sur le plan mental, en leur inculquant la notion du sérieux. Dans les petits détails tactiques, comme la lecture du jeu défensif face à un adversaire qui s’apprête à jouer long, ou encore techniques, comme dans la différence entre une passe de dix mètres donnée de l’intérieur du pied ou sur les lacets, qui fera que l’adversaire la lira plus difficilement; ou encore sur comment positionner son corps. Pendant mes séances d’entraînement, je reçois l’aide de mon délégué, qui va par exemple gérer un 7c7 dont j’ai donné les consignes – et je me place de manière à pouvoir quand même y jeter un œil – pendant que je travaille en analytique avec quelques-uns à côté.
Quel schéma tactique
privilégies-tu ?
Le
4-3-3 me paraît idéal en jeunes. Mais si tu les prépares pour un noyau d’adultes, ce
qui est mon cas, il est bon d’aborder les autres systèmes de jeu, pour de
possibles adaptations en match : le 4-4-2 avec un losange ou un carré au
milieu, le 3-5-2 pour observer et leur donner quelques petits trucs en plus.
|
Ce sur quoi tu es le plus intransigeant |
Ce sur quoi tu es le plus indulgent |
François BROGNIEZ |
Discipline
et travail sont les deux mots que je leur répète en début de saison. J'ai un caractère fort et droit, mais rassurez-vous, ce n'est pas l'armée. En dehors, je peux rire avec eux, et ils ne sont pas traumatisés en fin de saison (rires). |
|
Christophe PRÉSEAUX |
L’attitude ! Du joueur qui veut
progresser et réussir. Sur le terrain, en dehors de celui-ci, dans les
présences aux entraînements. Au-delà du talent, il faut la mentalité pour avancer. Sans quoi, il n’y a pas d’avenir. Si l’attitude est bonne, le
jeune peut toujours arriver à quelque chose. Sinon, il risque fort
d’abandonner aux premières difficultés. |
Le
manque de maturité. Sur le plan
mental (esprit fort jeune) ou morphologique (certains U15 peuvent déjà faire
une transversale de 40m ou ont une grosse frappe, d’autres pas). Cette
maturité viendra tout naturellement, à un moment donné. Mais il faut en tenir
compte. |
Laurent MÉGANK |
Le
sérieux à l’entraînement, l’attention aux consignes. Écouter,
comprendre, essayer. Ne pas râler et baisser les bras. Avec des ados de 14-15
ans, ce n’est pas évident. |
Le
droit à l’erreur. Ils peuvent
rater, comme moi je peux perdre des matchs sur une mauvaise décision.
L’important après une erreur, c’est de se battre pour la réparer. |
Thomas LAMBLIN |
La
concentration et l’application dans les séances
d’entraînement. Ne pas tricher et se cacher. Si le dépassement de soi fait
défaut, alors on empêche aussi son partenaire d'évoluer. |
Un
mauvais jour. Ca arrive de ne pas
être bien (Écoutez, coach, aujourd’hui
je ne suis pas dedans). Les erreurs
techniques, les différences de
morphologie. |
Ronny ROELEN |
La
mentalité, et le travail. La notion d’ensemble est fondamentale. Onze très
bons joueurs ne font pas une équipe. Mettre son talent au service du groupe,
voilà qui est primordial. |
Les
erreurs. Ils ont encore du temps
pour progresser ; c’est pourquoi on peut toujours reprendre quelques
gammes (passe longue, pied faible…) |
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