samedi 26 juin 2021

UEFA Euro 2020 : les coachs vus par nos coachs

Nous avons demandé à nos coachs régionaux de désigner leur coup de cœur concernant les coachs en exercice pendant ce premier tour de l’Euro, et d’argumenter leur choix en précisant les aspects ayant orienté celui-ci: personnalité, stratégie, etc.

Il ressort de ce sondage qu’à une écrasante majorité, c’est l’allenatore de la squadra azzura qui a marqué les esprits de nos techniciens…

Du dug-out au petit écran, tour d’horizon…

 

Roberto MANCINI


© Eurosport

Gestion de groupe

Une bonne gestion de son groupe, lance Sébastien Terlin. J’ai bien aimé l'idée de faire participer son gardien remplaçant. Beaucoup d’observateurs se sont en effet interrogés sur le sens de ce changement de gardiens à la 89e minute du match contre le Pays de Galles. J’ai lu que Mancini n’était pas entré au jeu lors de la Coupe du Monde en 90, et que ça l’avait marqué, note François Échevin. Respect des joueurs présents suite à la désillusion vécue lors de sa carrière, confirme Sébastien Wouters. Cette valeur est également relevée par Philippe Labie : J’ai trouvé admirable le fait qu’il ait donné du temps de jeu à tout son noyau, c’est une grande marque de respect envers son groupe.

On sent que c’est un groupe qui vit bien et qui est uni, analyse Steve Roussel. Le fait qu’il donne du temps de jeu à chacun hormis Meret (son 3e gardien) prouve à quel point il est un coach profondément humain, qui veille au bien-être de chacun. C’est extrêmement important selon moi quand on gère un groupe amené à vivre ensemble le plus longtemps possible.

Récemment désigné à la tête de l’équipe B des Étoilés d’Ère, Thomas Vandecasteele fait la même observation : On sent un rôle rassembleur très fort. Les joueurs sont heureux d’être là, fiers, se sentant tous utiles et mis en valeur.

Jean-Charles Fabrel est tout aussi admiratif: Mancini a réussi à bâtir un vrai collectif, bien huilé, et sans grosse individualité ou star comme l'Italie a pu en avoir par le passé.

En utilisant 25 joueurs en 3 matchs, il donne une grande confiance à son groupe, ajoute Bryan Losterman. Les joueurs se donnent à 100% parce qu’ils sont tous impliqués. Sa gestion humaine est parfaite !

Mix expérience – jeunesse

Le coach acrenois poursuit : Il a construit son équipe sur base des performances, et pas sur des noms. C’est un bon mix entre les jeunes et les joueurs d’expérience. Dans le même ordre d’idées, Philippe Labie : Il n’a pas hésité à reprendre des joueurs évoluant dans des clubs de moindre envergure, comme Sassuolo. Bis Leleu précise : Une charnière centrale expérimentée, avec Bonucci, Chiellini, Jorginho et Immobile. Locatelli et Barella, la jeunesse dans le milieu.

Un renouveau

Mancini a métamorphosé le jeu de la squadra, juge Gino D’Angelo. Un réel renouveau pour le foot italien. Le coach de Morlanwelz est rejoint en cela par de nombreux autres. Ainsi, Jo Duquène : On est vraiment loin du foot fermé que l’Italie proposait par le passé ; comme pour de Boer aux Pays-Bas, c’est un noyau en reconstruction et fort jeune. Ou Patrick Billiet : Fini ce football italien où c’était le cadenas. Au contraire, un jeu offensif, qui n’est pas sans faire penser à celui de la Belgique. Agréable à regarder, beaucoup d’automatismes et de choses à noter pour les coachs que nous sommes. Et l’on a pu découvrir lors d’un précédent reportage à quel point le coach velainois était attentif à s’inspirer des modèles proposés dans le haut niveau. Bis Leleu : Il a complètement modifié le jeu italien. Finis l’attentisme et le contre, place à l’offensive. Fabien Delbeeke : Il a fait d’une équipe réputée pour son « catenaccio » une formation offensive avec un festival de buts, un football qui fait plaisir à voir. Philippe Labie osera même parler de résurrection du foot italien !

Du côté d’Estaimbourg, on note via Steve Roussel : Il a réussi à changer une philosophie italienne relativement défensive qui se basait principalement sur le « catenaccio » pour la faire évoluer vers une équipe joueuse, offensive, mobile. Mobilité également soulignée par François Échevin, le coach esplechinois y ajoutant la variation dans le jeu et le fait de casser les lignes.

Plan de jeu connu

Écoutons d’abord deux coachs d’origine transalpine – mais qui réfutent tout soupçon de chauvinisme ! – nous en parler. Gino d’Angelo d’abord : On sent qu’un plan de jeu est établi, et que le groupe complet y adhère. Pas de places pour des starlettes dans le groupe. Humilité, générosité dans les efforts, passion sont les facettes de cette équipe. Fabrice Milone ensuite : Chaque joueur connaît son rôle, sa mission, et se met au service du collectif. Sans grande star. Thomas Vandecasteele abonde dans le même sens : Le système de jeu est huilé et maîtrisé à la perfection ; chaque joueur sait exactement quel est son rôle. De plus, les changements apportés en cours de match ou lors de la troisième rencontre n’ont jamais semblé modifier le plan de jeu, preuve supplémentaire que chaque joueur sait parfaitement ce qu’on attend de lui.

Jeu vers l’avant

On retrouve une squadra conquérante, un jeu rapide en reconversion, apprécie Olivier Gossuin. L’Italie montre un jeu vertical dès que possible, signale Ronny Roelen, qui relève en outre la liberté des joueurs en B+. Une philosophie de jeu ultra séduisante, poursuit Fabrice Milone, tournée vers l’offensive, la prise de risques et la passion. L’envie de jouer vers l’avant est confirmée par Seb Terlin et François Echevin. Avec beaucoup d'envie et de rythme, ajoute J-Ch. Fabrel. Un jeu qualifié de séduisant par Julien Tambour et de chatoyant par Gino D’Angelo. Un des plus beaux proposés jusqu’à présent, pour Steve Artisien. Confirmation chez Miguel Lionaise : C’est l’équipe qui a développé le plus beau jeu lors de ce premier tour. Animation et manière de jouer très énergiques, toniques, avec beaucoup d’intensité.

Petite leçon de tableau noir avec Philippe Labie, qui nous explique les options de cette équipe joueuse et joyeuse : Mancini a mis en place un jeu moderne, à partir du gardien déjà. On peut remarquer l’importance des deux latéraux, qui montent très haut le long de leurs lignes respectives, surtout côté gauche, avec Spinazzola, qui est droitier en plus. On a un bloc très haut, qui permet de s’installer chez l’adversaire, et surtout à la perte de balle, de pouvoir exercer un contre-pressing intense.

Thomas Vandecasteele ajoutant : Les latéraux, Spinazzola notamment, apportent énormément de présence offensive. Le milieu « charbonne » avec des récupérations rapides et de l’imagination en reconversion. Et les clés sont données à un Insigne qui évolue comme un poisson dans l’eau.

Pressing constant

Un pressing continu (Ronny Roelen) qui demande beaucoup d’énergie (Seb Terlin), avec des joueurs qui se battent pour la récupération du ballon (Olivier Gossuin), le plus haut possible (Steve Roussel). Corentin Douterlungne évoque lui aussi l’agressivité que les Italiens mettent dans leur pressing durant les 90 minutes, avec une grande débauche d’énergie. Steven Dangremont évoque à ce sujet la célèbre grinta, d’origine italienne : c’est à l’image du pays mais c’est aussi la signature du coach !

Bryan Losterman décortique la mise en place de ce pressing : Les trois joueurs du milieu de terrain – Barella, Jorginho, Locatelli ou Veratti - ne laissent jamais respirer l’adversaire. En B-, le 7 (Berardi ou Chiesa) et le 11 (Insigne) pressent constamment.

Des stats impressionnantes

30 matchs sans défaite, une statistique éloquente relevée par Patrick Billiet. Aucun but encaissé encore dans ce tournoi, signe de la rigueur tactique (Julien Tambour). Avec 7 buts marqués, on ne peut pas dire mieux, ajoute Steven Dangremont. Dans les transitions, de la perte à la récupération, tout est bien mis en place, c’est tactiquement très juste.

Classe naturelle

Une réussite chiffrée insolente qui fait naître  confiance et sérénité. Écoutons Steve Roussel : Mancini dégage un calme le long de la ligne, qui en dit long sur la sérénité italienne actuelle. On ne reste pas sur une série de résultats aussi positifs si on n’a pas bon nombre de certitudes et si on ne dégage pas une certaine sérénité.

C’est un coach calme et posé, confirme Philippe Labie. La classe à l’italienne. Rejoint en cela par Thomas Vandecasteele : Quelle classe ! Sa posture et sa tenue sur le banc puent l’élégance. Fabrice Milone ne va pas contredire ce constat : Quel gentleman en bord de terrain !

Kasper Hjulmand

 


© 7sur7.be

L’intense charge émotionnelle provoquée par le dramatique accident dont fut victime Christian Eriksen, et surtout la gestion humaine qui s’en est suivie de la part du staff danois n’ont pas laissé nos observateurs insensibles. Voici le témoignage de cinq d’entre eux :

 Par rapport à ce drame du premier match, il a laissé la parole à ses joueurs en leur demandant s’ils voulaient jouer contre la Belgique. Il a ensuite trouvé les mots pour leur permettre de se surpasser. Avec au final une qualification pour les 1/8e, et avec un jeu offensif. Après l’Italie, c’est la nation qui a le plus tiré au but ! (Alex Depraetere)

Il a laissé libre choix aux joueurs de vouloir être sélectionnés, et il s’est servi de cet événement pour insuffler une énergie et une cohésion folles à son équipe. Comment transformer un fait négatif en énergie positive, pour preuve la qualification en 1/8e. Respect ! (Michaël Browaeys)

 J’ai été touché par l’émotion du coach du Danemark. Ca fait du bien de voir que derrière tout ce business, il y a encore des hommes et des émotions. De plus il a su trouver, je pense, les mots pour transformer cette tragédie en une force qui, actuellement, impressionne (Gwen Rustin).

Son équipe qui était déjà bien soudée, est devenue un véritable bloc, pas simple à bouger. Ils ont perdu leur meilleur joueur et le cerveau de l’équipe mais le coach a su s’adapter. En plus d’être compacts, ils sont capables d’effectuer un gros pressing, comme on l’a vu les 30 premières minutes contre les Belges. Et, des images et des déclarations qu’on voit de lui depuis le début, on devine quelqu’un qui a la classe et qui est proche de ses joueurs. Sa philosophie de jeu est bien intégrée par son groupe (Julien Collie).

 Mon coup de cœur pour l’aspect humain va indéniablement au coach danois qui est passé par de drôles d’émotions depuis le début du tournoi. Je trouve très classe d’avoir laissé le choix à ses joueurs de poursuivre ou non la compétition après le traumatisme vécu lors du premier match. Quel travail psychologique il a dû fournir avec son staff pour remobiliser positivement ses troupes ! Cette force morale s’est encore plus vérifiée après la déception suite à la défaite contre nos couleurs et la fantastique détermination face aux Russes. Une très belle leçon de vie pour tous, et surtout un exemple d’humilité puis de caractère face aux destinées de la vie ! (Fred Debaisieux).

 

Roberto Martinez

 


© La Libre.be

L’adage selon lequel nul n’est prophète en son pays s’est presque vérifié à l’occasion de cette petite enquête, mais trois de nos entraîneurs ont toutefois choisi de citer notre coach national :

 Son équipe réalise un neuf sur neuf, il opère des changements gagnants, reste fidèle à ses principes – je ne suis pourtant pas fan du 3 arrière -, et ne laisse paraître aucune nervosité dans les moments difficiles, comme lors de la première mi-temps face au Danemark ! (Christophe Ergo)

 J’ai bien aimé son audace avec les changements en défense centrale, la confirmation de Denayer au troisième match aux côtés de Boyata et Vermaelen ; ainsi que le fait d’avoir lancé les cadres au deuxième match (Grégory Voiturier).

 Avec son 3-4-3, il a magnifiquement géré son groupe: du temps de jeu pour tout le monde, en gardant son animation habituelle. Ses remplacements contre le Danemark, sa rotation face à la Finlande, tout en restant fidèle à sa philosophie de jeu. Dans ses interviews, il est clair et explique parfaitement ses choix (Steve Delgrange)

 

Didier Deschamps



 © rtbf.be

Derrière ce trio de tête, deux coachs récoltent chacun deux voix. À commencer par le sélectionneur français. Ce sont les coachs de Luingne et d’Escanaffles qui nous en parlent : 

J’aime son 4-4-2 en possession, qui passe en 4-3-3 en perte de balle. Je pense que ce système n’est pas le plus compliqué, mais il faut surtout faire comprendre à ses stars offensives que leur reconversion est essentielle. Et je trouve que DD est très fort pour ça ! C’est un meneur d’hommes et il prône le dialogue avec ses joueurs, chose hyper importante selon moi (Giovanni Seynhaeve).

Laurent Debeurne, lui, met en exergue l’efficacité et le réalisme du technicien français, qu’il juge malin à l’italienne : à travers la stratégie et l’animation de jeu, je retrouve la culture de la Juve des années 80-90 : bloc bas, tout le monde défend, et si ouverture du score, catenaccio ! Surtout quand on a des atouts offensifs comme l’équipe de France a la chance d’avoir ! Ce n’est peut-être pas le plus beau à regarder, mais en football, seul le résultat final compte.

 

Viennent ensuite deux choix plus étonnants, celui du coach italien – ils ont décidément la cote ! – de la Hongrie :

 

Marco ROSSI

 


© lequipe.fr

Jonathan Krys a commencé par rappeler que lors de sa prise de fonction, le maestro a insisté auprès de ses joueurs sur son désir de les voir jouer avec cœur : On a redécouvert un football qui se joue avec des valeurs humaines : humilité, courage et sincérité. Quand on voit ses larmes après l’exploit contre la France… Chaque coach a connu ou connaîtra ce moment où on craque émotionnellement tellement on est fier de ses gars…

 C’est ensuite le coach de Bléharies qui souligne ses mérites. Comme beaucoup, il avait pensé à Mancini ou Martinez, avant de diriger son coup de cœur vers le sélectionneur de la Hongrie : Marco Rossi réussit quelque chose d’incroyable avec cette sélection. Qui aurait cru que cette équipe tiendrait sa qualification jusqu’à quelques minutes du coup de sifflet final face à l’Allemagne? Dans ce groupe dit de la Mort, ils ont tenu la dragée haute à trois grosses nations mondiales et peuvent sortir la tête haute. Il a réussi à instaurer un énorme esprit d’équipe dans ce groupe composé de joueurs que peu de gens connaissent. Certes le jeu n’était peut-être pas flamboyant, pour les amateurs de jeu de possession ou d’attaque placée, mais comment faire autrement face à de tels adversaires ? Sa mise en place tactique a failli faire mouche. L’histoire aurait été belle si  le courage, la fierté et l’abnégation de ses joueurs avaient pu venir à bout d’un des trois favoris du tournoi (Florian Sénéca).

 

Janne ANDERSSON


 © lequipe.fr

Last but not least, l’emblématique mentor suédois obtient les faveurs de Johan Devos. Voici ce qu’en dit le coach isiérois : J’aime bien sa disposition en 4-4-2, avec deux attaquants intéressants, Berg et Isak, et derrière eux Forsberg, qui vient régulièrement dans le rectangle. Et surtout une parfaite couverture en reconversion défensive. Il me paraît très calme, connaissant parfaitement ses forces et faiblesses. Premier de son groupe devant l’Espagne et la Pologne, joli coup réussi sans la star Zlatan ! Il me semble qu’il n’en est pas à son coup d’essai : en 2018, il avait déjà devancé l’Allemagne dans les poules !

 

Merci à tous les coachs qui nous ont livré ces bien intéressantes considérations tactiques. Place maintenant aux matchs à élimination directe, où il n’y a pas de place pour l’erreur, sous peine de devoir essuyer l’inévitable pluie de critiques. Vu les forces en présence et toutes les qualités de management qui viennent d’être soulignées, d’alléchantes confrontations s’offrent à nous !


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